Les sièges de style Louis XV
Les menuisiers en siège – c’est une spécialité au sein de la menuiserie – rivalisent de talent tout au long du 18e siècle. En effet, l’art de la conversation, la folie du jeu, le goût pour les réunions de famille et d’amis favorisent la diversification des sièges.
Quelques remarques avant de nous pencher sur ces différents sièges :
En presque trois siècles, les sièges ont beaucoup changé. Pensés pour s’intégrer parfaitement aux boiseries et aux autres meubles, ils prenaient place dans une pièce au décor homogène. Or, très souvent, ce contexte d’origine a disparu. On ne les voit plus qu’exceptionnellement dans la pièce qui leur était destinée.
De même, ils n’ont pas toujours conservé leur dorure ou leurs couleurs ; au 19e siècle, il était courant de les décaper.
Le siège est une œuvre collective. Un menuisier le bâtit, un sculpteur le décore, un peintre ou un doreur lui donne sa couleur, et enfin, un tapissier le garnit. Lorsqu’un siège est estampillé, il l’est du nom du menuisier. Jamais contraint à l’estampille, les sculpteurs ont sombré dans l’oubli.
Dès l’époque de la Régence, les sièges les plus luxueux ont un châssis amovible permettant de changer la garniture d’étoffe suivant les saisons.
Vers 1740 s’affirme le distinguo entre sièges à la reine et sièges en cabriolet.
« À la reine » ou « en cabriolet »
Les chaises et les fauteuils sont dits « à la reine » lorsque leur dossier est droit et « en cabriolet » lorsqu’il est courbe.
Le siège à la reine, héritage du Grand Siècle
Les sièges à la reine, plus guindés, sont en théorie « meublants ». Placés le long des murs, on les considère comme faisant partie des boiseries et ne sont pas destinés à être déplacés.
Le sujet – une accouchée recevant des amies venues voir le bébé – est original. Il commémore la naissance de la petite-fille du marquis de Courteille, alors directeur de la manufacture de Sèvres.
Remarquons l’unité décorative : les sièges, le chevet et les courtines du lit sont tapissés de la même étoffe. De même, les meubles sont peints du même blanc que les boiseries.
En pratique, les sièges à la reine étaient déplacés vers le centre de la pièce en cas de besoin. D’ailleurs, ces sièges au dossier droit suivent la tendance générale des meubles sous Louis XV : ils s’allègent, devenant ainsi plus maniables.
Notons que les chaises à la reine étaient plus rares que les fauteuils à la reine.
Le cabriolet, siège Louis XV par excellence
Fauteuils et chaises sont dits « en cabriolet » lorsqu’ils ont un dossier incurvé épousant le dos. Ce sont des meubles « courants », c’est-à-dire qu’on les déplace régulièrement. Au gré des besoins, on les dispose autour d’une table, on les rapproche du feu... Peu encombrants, légers, les cabriolets sont élégants et confortables. C’est d’ailleurs à une voiture légère, maniable, qu’il doit son nom.
Le siège en cabriolet apparaît vers 1740, à une époque où le décor sculpté des lambris se fait moins envahissant, se résumant à quelques fleurs. Les cabriolets s’accordent à leur environnement, rares sont les modèles très ouvragés et très dorés. Ils sont plutôt peints ou simplement cirés.
À chaque siège son usage… ou vice versa
Les menuisiers ont conçu de sièges pour s’asseoir ou s’allonger, pour jouer ou prier.
La bergère : un fauteuil à joues… avec ou sans oreilles
La bergère est un fauteuil à accotoirs pleins (joues). Elle est munie d’un épais coussin. Les premières bergères remontent à la fin du règne de Louis XIV ; elles sont donc de style Régence. Vers 1740, les modèles de bergère se diversifient.
Comme le fauteuil, elle peut être à la reine ou en cabriolet :