L’armoire romane d’Aubazine
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Abbaye d'Aubazine, Corrèze
Dans « armoire » nous entendons « armes », mais ça n’a jamais été un meuble destiné aux armes. Le terme dérive du latin arma au sens d’« ustensile ». Les Romains rangeaient dans l’armarium des objets du quotidien. Mais il existait aussi un armarium à destination religieuse, dans lequel on enfermait les lares, les divinités du foyer. La vocation religieuse de ce meuble aurait perduré au Moyen Âge puisque l’armoire ne semble exister alors que dans les églises. On y conservait vêtements et objets liturgiques, archives et autres biens précieux. Dans les habitations, les objets se gardaient dans des coffres et des rangements ménagés dans un mur – ce que nous appellerions aujourd’hui des placards.
Une datation incertaine, comme souvent au Moyen Âge :
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Armoire, chêne, plus de deux mètres de hauteur sur 2,50 m de longueur et 0,85 m de profondeur.
Fabriquée entre la fin du 12e et le début du 13e siècle, Corrèze, Aubazine, église Saint-Étienne. L’armoire s’ouvre par deux portes hautes dessinant des arcs en plein cintre – en arrondi – fréquents dans l’architecture romane. Les côtés de l’armoire sont ornés d’arcatures également inspirées de l’architecture romane : des colonnettes rapportées, en bois tourné, surmontées d’arcs en plein cintre. La façade, le dos et les côtés sont assemblés à tenons et mortaises et le tout est chevillé. Les planches des portes sont assemblées par feuillures et tourillons. À l’intérieur, elles sont consolidées par deux traverses en sifflet assemblées en queue d’aronde. Par la suite, j’espère pouvoir expliciter ces termes techniques – et les techniques elles-mêmes – grâce à l’aide d’artisans.
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Niche, église d’Aubazine ©Sébastien Colpin
L’armoire a vraisemblablement été conçue pour l’église où elle se trouve encore. Cette porte fermant une niche le laisse penser : même bois, même décor, elle est probablement de la main du même artisan, évidemment resté anonyme.
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Dessin de l’armoire d’Aubazine, tiré du « Dictionnaire raisonné du mobilier français de l’époque carolingienne à la Renaissance » d’Eugène Viollet-le-Duc, 1858-1870
L’armoire est enrichie de pentures : des fers forgés. Sur les portes, ce que l’on prend au premier coup d’œil pour d’élégantes extrémités courbées sont en fait des fleurs de lis mutilées, probablement à la Révolution. On y voyait alors un emblème royal, mais il s’agissait plutôt à l’origine d’un symbole marial. Blanche, la fleur de lys symbolise la pureté. Elle est par conséquent la fleur associée à la Vierge.
Sur le dessin de Viollet-le-Duc, les fleurs de lis sont nettement reconstituées.
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ettrine, enluminure sur parchemin, fin 15e s. ; Paris, musée du Louvre, département des arts graphiques ©Thierry Le Mage