Le coffre, LE meuble médiéval

Simple ou sophistiqué, utilitaire et d’une grande variété

Le coffre (du latin cophinus, « panier », « corbeille ») est alors le meuble principal, voire unique, des intérieurs qui en possèdent. Sa conception est simple : six planches : quatre longues – une servant de fond et une de couvercle ; une faisant office de façade et une autre d’arrière – et deux plus petites, carrées, pour les côtés.
Meuble de rangement, le coffre peut faire office de malle lors des déplacements, relativement fréquents, des seigneurs. Dans ce cas, ses ornements sont réduits au minimum, et il peut être renforcé de fers (pentures) et muni de poignées.
Objets utilitaires, les coffres se sont usés au fil du temps. La plupart n’ont donc pas été conservés. On en distingue toutefois plusieurs types, plus ou moins manipulables selon leur taille et leur poids.
Les coffres à couvercle bombé sont qualifiés de « coffre bahut ». C’était avant tout des coffres de voyage. Le bahut était dans un premier temps un accessoire de rangement bombé fixé sur le couvercle (plat) du coffre. On y plaçait les objets nécessaires lors d’un voyage. Peu à peu, le coffre de voyage a adopté un couvercle bombé ; cette forme lui confère une meilleure résistance aux chocs et permet à la pluie de couler. Le coffre bahut est souvent renforcé d’éléments en métal ou garni de cuir – une barrière contre l’humidité.
Aux 13e et 14e siècles, coffres et chaires sont souvent sculptés d’arcatures, de gâbles, rosaces, trilobes et quadrilobes directement inspirés de l’architecture gothique, contemporaine de ces meubles.
Au 15e siècle, un motif beaucoup plus sobre s’impose : les plis de serviette. Ils se déploient non seulement sur les meubles, mais aussi sur les portes et les boiseries tapissant les murs. Les plis de serviettes restent très en vogue jusqu’au 16e siècle, ils sont alors peu à peu supplantés par les motifs Renaissance.
Les plis de serviette sont d’une grande variété, tantôt réalistes, tantôt stylisés.
Certains coffres sont ornés de scènes historiées – religieuses, fantastiques ou inspirées de la vie courtoise.
Le combat de saint Georges contre un dragon afin de libérer une princesse est un thème fréquent au Moyen Âge.
Les pentures sont des ferrures. Leur rôle est double : maintenir les planches entre elles et embellir le meuble. Certaines planches sont assemblées les unes aux autres à plat-joint, c’est-à-dire simplement juxtaposées sur leurs petits côtés. Elles doivent donc être maintenues à l’aide de pentures. Ces barres de consolidation deviennent souvent d’élégants ornements. Ces éléments de fer forgé se trouve sur les meubles et les portes.
Voir : L’armoire d’Aubazine

Du coffret au coffre monumental

L’ivoire est sculpté en bas-relief de scènes courtoises. De gauche à droite : deux jeunes gens s’enlacent, puis le jeune homme pose la main sur le ventre de son aimée, il est agenouillé devant la jeune femme qui le couronne, et enfin, ils s’apprêtent à échanger un baiser. Ces scènes sont séparées les unes des autres par un arc trilobé, lui-même surmonté d’un arc brisé (en ogive) couronné d’un gâble (triangle) fleuri.
L’arrière du coffre est sculpté d’une scène de chasse : les deux jeunes gens sont à cheval, un oiseau de proie posé sur leur poing ganté ; ils sont précédés d’un sonneur de cor. Cette représentation stéréotypée de ce passe-temps de l’élite se retrouve sur les enluminures et les tapisseries contemporaines.
La licorne est très présente dans les décors médiévaux.
La plupart des coffres parvenus jusqu’à nous mesurent entre 1,50 mètre et 1,80 m de long ; certains sont plus petits, d’autres plus grands.
Article à consulter : les coffrets à décor d’estampes

Les coffres Renaissance

Au cours du 15e siècle, de nouveaux motifs venus d’Italie remplacent les fenestrages et les plis de serviette : cannelures, visages de profil, arabesques, grotesques… sans que la forme du coffre ne change.
Ce coffre ouvre sur le devant, ce qui n’a probablement pas toujours été le cas.
À la fin du 15e siècle, artistes et amateurs d’art commencent à fouiller le sol de Rome. Ils y découvrent de luxueuses demeures, dont les murs sont recouverts de fresques en bon état de conservation. Ces édifices, érigés un millénaire et demi plus tôt, sont alors enfouis, évoquant des grottes, d’où le terme de « grotesque » pour qualifier leurs peintures. Les grotesques forment des ensembles foisonnants, mêlant candélabres, figures fantastiques, enroulements végétaux. Le succès immédiat. Murs, meubles et objets décoratifs de la Renaissance se couvrent de grotesques.
La villa Madame est une des premières villas suburbaines – c’est-à-dire construite en dehors de la ville –, en l’occurrence sur les pentes du Monte Mario, aujourd’hui englobé dans la capitale italienne. Ces villas, destinées à accueillir des fêtes, voulaient rivaliser avec celles de la Rome antique. Il est donc logique que leur décor s’inspire de leurs lointains modèles. Les contemporains ont affirmé que son décor surpassait celui de la Maison dorée érigée pour Néron tout près du Colisée.
Les visages de profil sont inspirés des médailles antiques.
En Italie, une nouvelle forme est apparue au 15e siècle : le coffre inspiré du sarcophage antique.
Le coffre permet certes de ranger divers objets, mais n’est guère pratique. Pour y déposer ou en prendre un objet, il faut soulever un lourd couvercle, s’abaisser, voire s’agenouiller, fouiller d’une main tandis que de l’autre on maintient le couvercle. Lorsque l’objet recherché se trouve au fond du coffre, il faut vider celui-ci. Tous ces inconvénients expliquent la vogue immédiate de la commode, dont le nom évoque le caractère pratique. La commode, apparue vers 1700, est un coffre s’ouvrant en façade par des tiroirs qui permettent un rangement mieux ordonné. Son succès ne s’est jamais démenti.
À l’arrière-plan de ce tableau représentant la déesse de l’Amour et de la Beauté, on aperçoit une femme cherchant quelque chose dans un coffre. Agenouillée sur le sol, elle maintient le couvercle à l’aide de sa tête. Notons que deux coffres identiques sont posés l’un à côté de l’autre le long du mur ; il pourrait y en avoir un troisième, mais il serait dissimulé par le tissu de velours tendu derrière la jeune femme nue.
Prochain article : le cassone